Après un solide camp d’entrainement en Thaïlande (voir Journal de Koh Lanta Muay Thaï) j’arrive en Chine pour la première fois de mon existence. Bienvenue dans un autre monde. Barrière de la langue, comportements, habitudes, tout est différent et il va me falloir jongler avec ces nouvelles règles pour rejoindre une école de Kung Fu Shaolin. Souvent très drôles a posteriori, encore faut-il vivre ces expériences pour en apprécier la richesse. Sorties de la zone de confort garanties, nous allons pouvoir vérifier en Chine que le ridicule ne tue pas, et même tenter de s’en souvenir.
Des actions basiques comme retirer de l’argent ou prendre le bus, deviennent des missions. J’utilise les points info tourismes… pour la première fois de ma vie! Je fais téléphoner les gens pour moi car les interlocuteurs ne parlent que chinois. Of course. Mais ça passe! en prévoyant large, ça passe…
Dengfeng, berceau du Kung Fu Shaolin
La première étape de mon voyage consiste à rejoindre Dengfeng et ses montagnes. Elles sont le berceau du Kung Fu Shaolin en Chine. En leur coeur, le mont Song qui culmine à 1500 mètres. Surtout, elles abritent le temple de Shaolin et d’autres temples comme le temple Fawang, bijoux des arts martiaux niché de l’autre côté de la montagne et second plus vieux temple Shaolin du pays. C’est ici que j’ai prévu de m’entrainer, si l’on m’accepte.
Il existe de nombreux styles de Kung Fu en Chine. Mon intérêt va au Kung Fu Shaolin, outre légendaire par son entrainement hors norme et sa constance à travers les siècles, il serait à l’origine de tous les arts martiaux d’Asie de l’Est à partir de la Chine. Il représente une forme de mouvement très complète et aérienne. Inspiré de méditation et de nature (notamment du règne animal), il est avant tout défensif. Je vous invite à lire ce petit historique du Kung Fu et son développement si le sujet vous intéresse.
De Zhengzhou, capitale de la province du Henan (centre-est de la Chine), je parviens à monter dans le bon bus et parcourir les 150km qui me séparent de Dengfeng. La nuit est tombée. Une heure de marche plus tard, je ne trouve toujours pas mon auberge.
Dans la rue les gens me fixent du regard. Je fais l’objet de curiosité ici, dans une ville de petite taille au centre de la chine. Les enfants me disent bonjour en rigolant! Accompagné par un patron de restaurant qui a compris que j’étais en galère, il m’indique une ruelle sombre 1km plus haut que le repère GPS affiché sur mon téléphone. Apparement il faut que je m’engouffre dedans. Il me salue, tourne les talons et s’en va.
Je passe en mode « Vigipirate ». Dissimulation de l’argent liquide et des cartes bancaires. Un peu de monnaie sur moi au cas où je devrais céder quelque chose. Portable bien bloqué dans une poche fermée isolée s’il y a de l’action, séparé du portefeuille au cas où on me demanderait l’un ou l’autre. Sac à dos détaché prêt à sauter des épaules, mains libres, et le plus important: aucun signe non assuré ou d’hésitation. Un stylo dans la poche au cas où il faudrait planter pour se défendre n’est pas idiot…
On ne voit rien du tout dans cette ruelle! Aucune lumière. Mes yeux s’habituent peu à peu à l’obscurité. Ok go. J’arrive au bout sans encombre et sans croiser personne, c’est une impasse et l’hôtel est là! Incroyable. Me voilà donc arrivé après quelques péripéties, tout au traducteur et en langage des signes.
Cela fait 24h que je suis debout et il serait bien de manger. Sauf que 22h30 le soir dans une petite ville du centre de la Chine, c’est une autre mission qui commence. Les codes sont différents. Je termine la journée avec un sachet d’arachides épicées, une cuisse de poulet et une bouteille d’eau. Il va falloir s’améliorer dès demain!
Pour la petite anecdote j’irai jusqu’à me faire virer d’un restaurant parce que je ne parlais pas le chinois et que personne ne voulait faire l’effort avec le traducteur ou mon langage des signes. Le ridicule ne tue pas… Physiquement exténué par deux mois d’entraînement intensif de Muay Thaï, il s’agit de dormir et trouver un sommeil de qualité.
Pourtant dès le soir de mon arrivée à l’auberge, on me propose de partir tôt le lendemain matin accompagner un Chinois pour aller explorer la montagne qui abrite le temple de Shaolin et le visiter ensuite. Bien évidemment j’en suis.
Ainsi nous partons de bon matin randonner dans les montagnes au départ d’un village pour atteindre et visiter ensuite le monastère de Shaolin. Riche idée.
L’ambiance est très spéciale, mystique. Nous parcourrons 15km sur les chemins pavés qui traversent la montagne pour rejoindre Shaolin. S’il y a beaucoup de monde pour une marche de cette difficulté, essentiellement des Chinois, j’apprendrai que c’est une période de congés dans le pays et que les gens aiment se rendre au temple.
Un décor de film s’offre à nous. C’est l’impression d’être dans une fiction traditionnelle d’art martiaux chinois et que je vais voir débarquer Pai Mei d’une minute à l’autre, que nous arrivons au fameux temple de Shaolin, origine du Kung Fu.
Le temple est impressionnant à visiter. Il transpire d’histoire et de force. Au cours des siècles les moines-guerriers y ont perfectionné leur art dans le silence des montagnes, principalement pour leur propre salue, intervenant parfois dans les affaires de l’empire en réponse à des injonctions politiques.
La spiritualité, la discipline et la force qui règnent ici sont palpables. Le temple s’érige tel un vestige d’un savoir ancien. À Shaolin, tout mouvement de la vie quotidienne devenait une source d’entrainement pour une pratique martiale. J’aurai la chance de remarquer plus tard la puissance de cet enseignement. Tout ici est dédié à l’amélioration du lien corps-esprit, de cette connexion et de son alignement, à des fins martiales.
Dans la salle d’entrainement originale qui fût préservée, le visiteur peut observer de larges trous dans le sol pavé. Ceux-ci furent forgés au fil des années par les répétitions de coups de pied des moines-guerriers. Juste inouï.
Aussi magnifique que bondé de monde, je préférai m’attarder plus tard dans le temple Fawang, son petit frère de l’autre côté du mont Song, resté plus authentique et surtout beaucoup plus calme.
En repartant, hors du temple les écoles de Kung Fu Shaolin s’entraînent dans une discipline miliaire.
Apprendre le Kung Fu Shaolin
Il me faut maintenant intégrer une école de Kung Fu Shaolin. Le but de mon voyage est de découvrir cette pratique, en tirer des enseignements pour agrémenter mes connaissances des arts martiaux et de l’approche énergétique. Je cherche donc une bonne formation. Le temple Fawang est réputé pour cela. Mais comment y accéder? Après plusieurs échanges email avec un correspondant du temple alors que je n’étais pas encore en Chine, je perds le contact.
Par chance le patron de l’auberge connaît le grand maitre du temple Fawang. Il me dit pouvoir obtenir un entretien avec lui pour demander mon intégration au temple et recevoir une formation au Kung Fu Shaolin. Il me propose même de m’y conduire… Très aidant, je vous mets le lien vers l’auberge ici si vous avez le projet de vous rendre à Dengfeng et explorer Shaolin et les écoles de Kung Fu environnantes. Par contre je vous préviens, il mange de l’ail cru au petit déjeuner. Définitivement en très bonne santé, prenez bien garde de ne pas vous faire souffler dans le nez par le patron…
Direction le temple Fawang! Nous arrivons à un poste de contrôle avant d’emprunter la route qui monte au temple. Je comprends qu’on nous laisse passer parce que je dois être présenté au Maître et parce que je souhaite apprendre le Kung Fu. La route qui y conduit est magnifique. Nous traversons les champs d’abricotiers et commençons l’ascension.
Sur l’autre versant du mont Song, le second plus ancien temple Shaolin. Le temps semble s’être arrêté dans ce lieu à part, niché au creux de la montagne.
Des moines Shaolin sont présents, au calme. On fait appeler le grand Maître. Je sens que mon guide est stressé tout d’un coup. Je réalise que je vis un moment spécial. Coup de pression.
Le maître arrive, sans cérémonie nous entrons dans une salle et tout le monde sort à l’exception de mon guide qui reste pour la traduction. Nous nous asseyons, toujours pas un mot, du moins à mon intention. Et cela dure. À cet instant je m’interroge: qu’est-ce que je fous là?
L’ambiance est très bizarre. Il me toise. Je ne sais pas quelle attitude adopter. Fervent défenseur du naturel, advienne que pourra. Nos regards se croisent. Il est vraiment impressionnant. Difficile de lui donner un âge. Il commence à parler avec mon guide en me regardant parfois. Je ne sais pas de quoi il retourne, on ne me traduit rien encore. L’atmosphère est lourde.
Enfin il décide de préparer le thé et commence la cérémonie. Parfois il fait un mouvement de tai chi où il « manipule » l’énergie. Toujours aussi étrange mais quel moment. Le maître dégage une grande force. Je me détends, j’aime apprécier cela. Pour autant, je ne suis pas certain de notre compatibilité.
Nous commençons à boire le thé et à échanger. Il me demande mon âge, ce que je suis venu faire en Chine, pourquoi je souhaite apprendre le Kung Fu Shaolin et mes motivations quant à Fawang. Les échanges se font par le guide et nos traducteurs de smartphone! Puis il se met à me parler un peu en français… Incroyable.
Alors nous discutons. J’apprends qu’il a beaucoup voyagé dans le monde, notamment pour enseigner le Kung Fu de Shaolin. Nous en venons au fait: je ne pourrai pas intégrer le temple Fawang. Il aimerait que je m’y entraine mais il ne peut pas accorder mon hébergement dans les murs en raison d’une mesure récente. En effet, après de multiples accidents au cours des entrainements de Kung Fu Shaolin dans les écoles de la province, dont au moins deux entrainant la mort de jeunes enfants (je vous passe les détails qui font froid dans le dos et qui en disent longs sur la rigueur et la difficulté de l’entrainement Shaolin, voire la bêtise en ce cas présent), le gouvernement a empêché l’enseignement du Kung Fu aux jeunes de moins de 12 ans et aux étrangers en interdisant leur hébergement dans les écoles.
Sauf que Fawang est au milieu des montagnes et que la première auberge, celle dans laquelle je reste, est à une dizaine de 10km plus bas. Compte tenu de la difficulté, les horaires et le volume de l’entrainement, il serait très compliqué de faire le trajet tous les jours. Il faut être sur place. Je suis à la fois déçu de ne pouvoir résider un moment dans ce lieu magique, et soulagé de pouvoir prendre le temps de la réflexion.
Nous repartons. Je reviendrai plus tard pour explorer le temple et y passer du temps. En attendant, il me faut trouver d’autres options pour apprendre le Kung Fu Shaolin. Le soir je partagerai le repas avec tous les Chinois de l’auberge et les amis du patron. Un grand moment de culture dans une belle demeure chinoise typique!
L’école de Shifu, alias Maître Zhang
En plan B, j’avais relevé une école de Kung Fu Shaolin nouvellement fondée. Je contacte une association française qui fonctionne avec cette dernière afin d’obtenir l’adresse chinoise et décide de m’y rendre. Pour voir.
L’école se situe à environ une demi-heure de marche, mais les adresses chinoises fonctionnent pour les GPS chinois. Ainsi je me retrouverai à 2h à pied, sur la route du temple Shaolin, au milieu de rien… Je demande plusieurs fois mon chemin, l’école etc. Rien. Finalement après insistance (et pas mal de refus pour de l’aide gracieuse), un jeune Chinois accepte de me monter sur son scooter électrique et me guide sur le bon chemin. Dernière ligne droite, je commence à monter vers les montagnes et aperçois deux jeunes s’entrainer au bâton, sous l’oeil bienveillant d’un instructeur.
Je reconnais Maître Zhang. Je suis arrivé. Il est content de me voir, il a été informé par l’association que je passerai lui rendre visite. On me demande d’attendre la fin de l’entrainement et ensuite on s’occupera de moi. Parfait.
Nous faisons la visite de l’école: salle de calligraphie, salle d’entrainement, dortoir, cuisine, salle de bains, etc. Comme prévu par la loi, les jeunes de moins de 12 ans ont été renvoyés chez eux. Comment vais-je pouvoir intégrer l’école en tant qu’étranger? Maitre Zhang a fait de son école de Kung Fu Shaolin également une société d’échange culturel et linguistique. Ainsi, si j’apprends le chinois je peux loger ici et pratiquer le Kung Fu Shaolin selon son enseignement. Le courant passe bien, il semble bienveillant.
Quand serait-il possible de commencer? Toujours à l’aide de nos traducteurs bien qu’il connaisse quelques rudiments d’anglais, il me répond demain si tu veux. BANCO!
Ainsi le lendemain je quittais mon auberge à pied, sac sur le dos, pour rejoindre l’école de Maître Zhang, lui-même issu du temple Fawang. Encore une fois il est difficile de définir son âge avec certitude. Shifu (c’est ainsi qu’on appelle la personne qui nous apprend le Kung Fu) est arrivé à Fawang à l’âge de 9 ans. Il passera 20 ans de sa vie à étudier et pratiquer le Kung Fu Shaolin, avant de créer sa propre école: Zhang Qian Kung-Fu School, à Dengfeng, Chine.
Impatient de vivre cette nouvelle aventure, je gambade dans les rues de Dengfeng direction le pied de la montagne et l’école Zhang Qian.
Aussitôt arrivé Gao, étudiant chinois de l’école, me montre mon lit (une planche) dans le dortoir que je vais partager avec Marco, un autre français. On me fournit l’uniforme de l’école et les mythiques chaussures Feiyue. Tout le reste de l’équipe est partie s’entrainer dans une autre province en raison de la nouvelle législation. Ainsi l’effectif est malencontreusement restreint, avec l’avantage de bénéficier de l’enseignement quasi particulier et direct de Shifu. Les choses sérieuses peuvent commencer.
L’entrainement du Kung Fu Shaolin
Le premier entraînement se déroule peu de temps après mon arrivée. Je découvre un nouveau monde duquel je ne sais, en pratique, rien. Heureux d’entamer la formation et entrevoir cette fameuse discipline pour laquelle j’ai généré une certaine appréhension, en me documentant sur l’entrainement Shaolin. Les moines-guerriers sont des monstres, physiquement et mentalement. Cela fait quatre jours que j’ai quitté la Thaïlande et le voyage ne m’a pas permis de bien récupérer.
J’ouvre une parenthèse intéressante sur la capacité d’un corps (sur)entraîné. Ce dont il faut se rendre compte c’est que je suis exténué dans un certain référentiel, celui d’un athlète qui achève un long camp d’entrainement. Dans le même temps, la résistance et la capacité d’effort se sont hissées à un tout autre niveau. Ainsi, bien qu’entamé physiquement, l’endurance s’est considérablement accrue. Le référentiel n’est plus du tout le même. Fatigué certes, le corps délivre systématiquement sa performance. Idéalement une ou deux semaines de repos actif auraient été nécessaires pour bien capitaliser les gains et renouveler l’énergie. Repartir frais. Mais dans les voyages, la vie s’accélère parfois.
Dès la fin du premier entrainement je sais que mon cardio est supérieur à ce que requiert le Kung Fu Shaolin. La pratique n’est pas tournée vers cela. Ainsi je vais pouvoir me donner à fond sans avoir à gérer, comme il en était le cas dans la pratique du Muay Thaï. Question puissance et explosivité je suis largement aligné sur ce qui est attendu.
La grande surprise porte sur les jambes, et les cuisses en particulier. La solidité des appuis est fantastique! Ils sont très bas et m’explosent les muscles des cuisses. J’ai rarement eu aussi mal sur ces zones. Je comprendrai après quelques entrainements qu’ils sont la base du Kung Fu Shaolin. Des appuis bas, ancrés dans le sol.
Par ailleurs, il va me falloir stimuler la mémoire lors de l’apprentissage des « taolus » ou taos. Ils sont au Kung Fu Shaolin ce que les katas sont au karaté.
Autre nouveauté, la souplesse est très soignée, elle fait partie des capacités importantes de ce style. Une attention toute particulière est portée à la respiration.
Assez vite, je suis perdu dans l’apprentissage des Taos. Ne pas savoir est très bon signe: je suis au bon endroit pour progresser.
Voici comment se déroule une journée type dans une école de kung Fu Shaolin:
- Méditation libre avant 6h.
- 6h: premier entrainement. Réveil musculaire: Qi Gong, footing, étirements et assouplissements suivi de la pratique d’un ou des Taos ou entrainement physique Kung Fu (beaucoup d’exercices de jambes, sauts, assouplissements).
- 7h: petit-déjeuner suivi d’un temps libre.
- 8h30: deuxième entrainement Kung Fu ou calligraphie et cours de chinois. Les deux pratiques sont passionnantes. Je remarque que je suis aussi dexter des deux mains pour la calligraphie, exactement comme lorsque j’ai appris à écrire dans mon enfance. Après un cours, nous partons généralement courir dans la montagne pour se défouler…
- 12h: déjeuner. Temps calme: sieste, méditation pour qui veut, voire les deux. En général tout le monde ronfle.
- 15h30: reprise de l’entraînement. Kung Fu et gymnastique. Nous faisons des étirements et assouplissements pour les jambes, des saltos, des flips sur la tête et autres sauts de main. Parfois nous allons nous entrainer en hauteur en escaladant les montagnes au détour d’un temple abandonné. En haut nous rechargeons les batteries au bon soleil de printemps sur les rochers chauds. En général nous terminons l’entrainement par la pratique des taos.
- 18h: fin de l’entrainement, douche.
- 18h30: diner.
Avec mon collègue Marco, nous allons parfois faire le plein de fruits. Melon, pastèques, mangues délicieuses que nous achetons à des vendeurs ambulants, pommes, cerises et abricot du jardin… Inutile de préciser le genre d’apport énergétique qu’il faut pour six heures d’entrainement par jour. Quand ce n’est pas sept! À la fin nous nous entrainerons même le soir après diner. Quand on aime…
Typiquement nous restons dehors jusqu’au coucher du soleil à lire, discuter ou marcher et tout le monde regagne son lit spartiate pour une nuit bien méritée, prêt à recommencer le lendemain. L’entrainement est quotidien. Pas de jour de repos dans le Kung Fu Shaolin mais le dimanche est plus léger, avec l’après-midi libre. À part les cours de calligraphie et de chinois, nous nous entrainons toujours en plein air. Vous trouverez une vidéo de mon entrainement à la fin de cet article.
La vie met-elle sur notre route les gens que nous avons besoin de rencontrer? Marco pratique le kung-fu depuis longtemps. Il vient de terminer une formation en pharmacopée chinoise et il travaille avec les médecines énergétiques. Nous échangeons beaucoup au cours de discussions riches et ouvertes. Il se plonge dans la méditation.
Malheureusement après une semaine d’entrainement Marco se blessera. Je me rapprocherai alors de Gao, le jeune Chinois qui s’entraine avec nous et nous sert souvent d’instructeur tellement il est doué! Nous deviendrons très amis et ne cesserons de nous entrainer ensemble à tout moment de la journée, se serrant les coudes lorsque Shifu durcit l’entrainement. Je deviens Goga (grand frère) et lui Didi, petit frère.
Réaliser un rêve, encore
Quand j’expliquais aux gens que je partais m’entraîner à Shaolin et découvrir le Kung fu dans son berceau, la réaction fut souvent: « quelle chance, je suis jaloux, c’est un rêve, c’est rare, peu commun, » etc.
Le Kung Fu Shaolin est un rêve simple, matériellement. Si peu de gens s’y risquent c’est surtout qu’il est difficile à accomplir physiquement et psychologiquement. Pour cause c’est un chantier sur soi-même. Sur la résistance, la volonté, l’abstinence, l’abstraction voir la libération de l’ego, l’abandon du confort en même temps que du « Moi je ».
L’entraînement martial des moines-guerriers et des conditions rudimentaires, presque spartiates, mettent à l’épreuve. Une constante de discipline et de rigueur qui tend vers l’ascétisme. Le principe même de l’entraînement Kung Fu Shaolin est: « when there is no pain there is no gain ». Sans souffrance, sans évoluer hors de la zone de confort, on ne progresse pas. Pour les pratiquants Shaolin, repousser les limites du corps et de l’esprit est une source de satisfaction.
Nous pratiquons le Qi Gong car nous le demandons à Shifu. Le Qi Gong n’est pas systématique, les jeunes Chinois n’y sont pas formés en général. C’est une forme méditative en mouvement, dans laquelle s’enchainent contraction et relaxation pour la bonne circulation de l’énergie.
En s’exerçant au Kung Fu, les Maîtres pensent que nous apprenons la nature. Chaque fois que nous pratiquons l’entrainement Shaolin, nous aspirons l’énergie positive. L’intégration du Yin (Qi Gong) et du Yang (Kung Fu) est l’essence du style Shaolin. Dans sa forme martiale, il est l’utilisation optimale de l’énergie, du Qi, pour la défense.
L’apprentissage des Taos fut lent à mon sens, tant dans la mémorisation des combinaisons que dans la réalisation des bons mouvements, n’ayant aucune base en la matière. En s’entrainant fort, je connaissais les deux premières formes en moins de deux semaines de pratiques. Shifu avait mis une carotte: l’apprentissage des armes, notamment du bâton contre la maitrise des deux premiers taos. Et comme je n’ai pas le temps, je m’entraine huit heures par jour désormais. C’est ainsi que l’on gagne le droit d’apprendre le bâton Shaolin.
Alors je réalise, faisant tournoyer le bâton Shaolin au pied du mont Song Chan, ce que je suis en train de vivre. Toute l’appréhension générée, justement parce que c’est énorme. C’est un rêve de gamin que je réalise mais que le moi gamin n’aurait pas pu réaliser. Et en réalisant nos rêves, nous grandissons.
A posteriori, l’expérience achevée, il est intéressant de se remémorer les pensées précédant cette aventure. Honnêtement, l’entraînement Shaolin étant réputé pour sa rigueur et sa difficulté mentale et physique, j’étais plutôt anxieux de rencontrer cette forme de Kung Fu. Effectivement c’était rude. Intense et nouveau. Et comme d’habitude, ça passe..!
Le niveau monte d’un cran, on évolue, on muscle l’esprit et le corps, et on ressort grandi. De l’importance de l’environnement et cette capacité a s’y adapter rapidement. Encore une fois il était inutile de penser, et repenser le voyage. Et si l’entraînement, et si… Non. On y va. On fait. On gère dans l’action. Dans le mouvement. Dans le présent.
Gardons donc cette énergie mentale pour créer dans l’instant présent plutôt que pour craindre un futur qui n’est que ce que nous en ferons le moment venu.
Vous avez mérité mon trésor. Sortez les Pop corn: 10min au coeur du Kung Fu Shaolin.
Pour vous rendre compte du niveau de Shifu, le voici en action au temple Fawang notamment, il y a quelques années…Impressionnant est un faible mot. voir la vidéo
Je vous mets ici le lien vers l’association française qui organise des stages avec l’école de Kung Fu: Zhang Qian Kung-Fu School, à Dengfeng en Chine.
À bientôt pour un nouvel épisode en immersion sur la grande muraille de Chine.
Salut,
J’ai lu avec attention ton article, j’ai 28 ans, je cherche à aller dans un temple pour m’entraîner dans le but d’apprendre de cet Art, de cette Culture. Je recherche un temple authentique, en pleine nature ou l’on peut se concentrer sur soi-même (j’ai l’impression que cela été le cas pour toi). Je ne veux pas de quelque chose du style usine et où il y a des centaines d’élèves et vraiment apprendre avec un maître.
J’aimerais savoir si tu me conseillerais ce temple ou un autre à ta connaissance.
merci
Cordialement
Bonjour Yassine, Cela me semble une riche idée 😉 Si tu souhaites absolument t’entrainer à l’intérieur d’un monastère, je te recommande le temple Fawang. Magnifique endroit qui n’a rien à envier à Shaolin, plus tranquille, niché de l’autre côté du Mont Song. Cependant Fawang est tout de même connu et fréquenté. Tu y trouveras beaucoup d’élèves et d’étudiants étrangers. Un endroit si idyllique qu’ils ont aujourd’hui leur propre site web pour programmer les séjours Kung Fu… https://www.fawangtemple.com. Pour plus de tranquillité et d’immersion dans la culture chinoise, je te recommande l’école Zhang dont le lien est à la fin de… Lire la suite »
Salut ton article est vraiment top ! Sympa les tofs avec Marco xD. Pour info l’école de Zhang a son propre site (stage-kungfu-chine.fr) si tu es ok pour lui faire un lien. Perso j’ai hâte d’y retourner, ptre qu’on s’y verra ! @++
Bonjour,
Merci pour ton commentaire qui fait plaisir. J’en déduis que tu as passé du temps avec Marco sur place, cool 😉 à quel moment étais-tu à l’école ? Avec joie si nos chemins se croisent ! ps: j’ai fait le lien pour le site de l’école.
Oui j’ai rencontré Zhang qd je suis allé à Fawang 2 mois en 2018 puis je l’ai suivi dans son école entre juin et aout 2019 donc on s’est raté de peu ^^ Merci bcp pour le lien (merci pr l’asso) et oui, dès que ça réouvre j’y retourne, c’est mon nouveau lieu de retraite xD Ps : j’ai continué à lire ton blog, il est bien écrit, bien tenu, ça donne envie d’y passer des heures !! @++ PL
Ah d’accord ! C’est pas mal comme retraite effectivement 😉 Merci à toi et merci pour le blog Dans la joie que nos chemins se croisent. À bientôt.
Bonjour,
un très grand merci pour ce superbe témoignage qui m’a beaucoup touchée. Il transmet sérénité et harmonie. Tu semblais être en totale adéquation avec toi-même, avec tout ce qui t’entourait et je te remercie d’avoir partagé ces sensations.
Je recherche cette adéquation, cette harmonie. Je n’ai pas trouvé comment m’en approcher mais ce témoignage est vraiment inspirant.
Bonne continuation
Valérie
Bonjour Valérie,
Bienvenue et merci pour ce commentaire chaleureux. Ton ressenti et ce que le récit de cette aventure t’inspire me remplissent de joie. Cette adéquation avec soi-même est tout le but du développement personnel à mon sens. En avoir conscience et rechercher l’harmonie me semblent déjà une bonne approche 😉
Les arts martiaux et les voyages sont des terrains fertiles pour cela mais il y a bien d’autres voies, notamment à travers les arts.
Bonne continuation également, au plaisir,
Bonjour est-il possible de suivre une longue et vraie formation pendant plusieurs années dans l’école de Shifu, alias Maître Zhang.ou peut on seulement y rester de courte durée ?
Bonjour, que signifiez-vous par « vraie » formation ? un diplôme ? une certification ? Pour cela il faudrait vous rapprocher de l’association française qui fonctionne avec l’école (lien en bas de l’article). Autrement vous pouvez bien entendu rester sur une longue durée. Plusieurs mois assurément, modulo visa. Quant à l’enseignement de qualité, il est pour moi la meilleure certification :°)